Kosovo : Un pays d’autodétermination
« Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel. »
Les médias, les dirigeants de ce monde - même les plus pragmatiques - vont de visions biaisées en visions biaisées lorsqu’il s’agit de comprendre les guerres qui n’en finissent pas et les pays qui se désarticulent au gré des peuples, ethnies ou sous-ethnies. La Yougoslavie, ce puzzle décomposé qui a fait les pays de la prochaine fournée de l’UE, en est un exemple assez net, car dénué de particularismes africains ou moyen orientaux, de l’esprit analytique occidental face à un conflit ethnique (ici dû à un réveil des nationalités tardif pour cause de chute de fédération communiste).
Première leçon à retenir : l’occident ne fait rien ou intervient après avoir pris position selon une vision binaire bon/méchant (défini par des critères aussi précis que le nombre de morts, la méchanceté des dirigeants, etc.). Cette constatation ne souffre d’aucune demi-mesure, ni contre-balancement. Et elle peut, bien sûr, prendre (surtout) en compte des critères marchands ou de bon voisinage.
En Yougoslavie, le méchant était Milosevic. Donc le peuple serbe. Les bombardements de Sarajevo ont été faits sur une analyse borgne des évènements, sans prendre en compte - par exemple - les épurations ethniques des serbes en Croatie (le contraire étant aussi vrai). Le ressentiment du peuple serbe va en conséquence perdurer, et laisser une empreinte tenace dans la région. Paradoxalement, cependant, la Serbie d’aujourd’hui en veut plus à l’occident qu’à ses voisins…
Le Kosovo, lui, est promis à un avenir de pays indépendant. Mais un pays indépendant sous tutelle internationale. Une sorte de Bosnie-Herzégovine bis. Avec pour seules ressources le FMI, l’UE, les Etats-Unis, et l’ONU. Partant d’une belle idée, celle de l’autodétermination, on en est arrivé, à coup de bombes sur Sarajevo, à faire un Etat sur les ruines de la Serbie. Un petit Etat sans ressource, au peuple exsangue, mais un Etat quand même.
La genèse artificielle d’un Etat bâti sur des dates butoirs par de grandes négociations ONUsiennes, et qui vivra artificiellement sur des ressources qui ne lui appartiennent pas, aura alors un parfum d’inachevé, laissant de côté cet arrière goût de tenace de d’inimitié profonde que les kosovars et les serbes cultivent encore.
Que faire alors ? Laisser le Kosovo sur ses promesses d’indépendance en friche en retardant l’échéance le plus possible ou pousser vers le fait accompli la Serbie démocratique (dont la constitution stipule ironiquement l’appartenance inaliénable du Kosovo à la Serbie) ?
De toute façon, les Etats-Unis ont prouvé que les négociations n’en étaient pas vraiment en affirmant qu’ils proclameraient unilatéralement l’indépendance après une date butoir ; et la proposition de Belgrade de confier 95 % de la gestion de la province aux Albanais, le reste – essentiellement le contrôle des frontières et la représentation à l’ONU – restant sous juridiction serbe n’a pas été étudiée.
Reste aux Serbes le fol espoir de se porter candidat en 2008 à l’UE avec la Kosovo encore dans la besace, ce que va tenter de faire Bozidar Djelic. Avant que la région n’ait à subir les dernières affres de la défunte Yougoslavie.
P.S : il est étonnant que le Kosovo n’ait jamais été comparé à la Palestine… Cet Etat que pourtant tout le monde s’accorde à vouloir construire, ce peuple qui plus que tout autre à le droit d’autodétermination, et qu’on laisse pourrir pour la simple et bonne raison qu’Israël n’est pas la Serbie !